Photos : Richard Saint-George

Appareil robuste, apparu sur le marché civil au milieu des années 1960, le Hughes 269 est aussi connu sous l’appellation militaire TH-55 Osage. Multifonctionnel, cet hélico est disséminé aux quatre coins de la planète. Au Canada, 37 Hughes 269 A, B et C plus 31 Schweizer 269 C et D sont immatriculés. Nombre d’entre eux volent au Québec.

L’hélicoptériste Hughes construisit environ 2800 modèles 269, dénommés aussi 300 par extension, à partir de la série B. McDonnell Douglas racheta la compagnie, en 1984, avant de la céder au fabricant de planeurs et motoplaneurs Schweizer. Avec la reprise de la production, 1000 exemplaires supplémentaires furent vendus. Sikorsky prit le relais en 2004 ; puis, en 2009, il mit sur le marché le S-300C. Assez fébrilement d’ailleurs ! En 2015, le géant Lockheed Martin absorba la compagnie. Actuellement, sur le site Internet www.lockheedmartin.com n’apparaissent plus que les gros biturbines S-76 et S-92. Exit, apparemment, le petit 300 à pistons !  Heureusement, tout ne semble pas totalement perdu puisque – comme toujours – les Chinois demeurent à l’affût des bonnes affaires. Ainsi, Avicopter présentait, en mai 2016, son AC310 – un clone revu et adapté du Schweizer 300. Rappelons aussi que le manufacturier italien Breda Nardi bâtit autrefois, sous licence, des 300 sous appellation NH-300C. Quelques-uns furent utilisés par l’armée grecque. Depuis, la compagnie qui produisait aussi le NH500 – originellement un Hughes MD 500 – a été absorbée par Agusta. L’histoire se répète…

Évolutions et applications

Comparativement aux Hughes 269 et 269A qui ne possédaient que deux sièges et un rotor muni de pales basiques, le modèle 269 B (certifié en 1963 par la FAA) comprend un strapontin central amovible, conçu pour un passager. L’aérodynamisme des pales du rotor principal, les matériaux employés ainsi que leur longueur (+ 3 po, soit 7,6 cm) furent également perfectionnés. Sur le 269C, communément baptisé 300C, le moteur est plus puissant : 190 au lieu de 180 chevaux. Cet apport confère à l’hélico une meilleure capacité à monter verticalement (travail à l’élingue, décollage en zone restreinte, vol d’instruction, etc.). Une version agricole, le 300AG, fut parallèlement développée par Hugues. Celle-ci rencontra un certain succès. Des versions « ambulance », « police » ou encore « d’entraînement militaire » virent aussi le jour.

La spacieuse et non moins vitrée cabine du 269C.

Le Hughes 269C, devenu Schweizer 300C, demeure l’une des machines par excellence pour l’apprentissage du pilotage d’hélicoptères. Par extension, cela en fait un choix privilégié pour les propriétaires privés. Économique, endurant et sachant pardonner, celui-ci protège aussi ses occupants en cas de crash. Selon l’instructeur Stéphane Bard d’Hélico Pro/Foxair (CSB3), faire une autorotation aux commandes d’un Hugues est bien moins stressante que sur un Robinson R22. La réserve de puissance maximise aussi le décollage. Pour avoir eu l’occasion d’essayer à plusieurs reprises un 300, je dois admettre un certain enthousiasme. Son côté un peu tracteur me plaît et me sécurise. Sans parler de sa configuration trois places ! Et puis, peu m’importent les quelques nœuds sacrifiés en croisière… au profit d’autres avantages.

Techniquement éprouvé

Construit essentiellement avec des composants métalliques, le Hughes/Schweizer est l’archétype de l’hélicoptère léger du milieu du XXe siècle. Disposant d’une charge utile conséquente – presque son propre poids à vide, à partir du numéro de série 210 – il est, nous l’avons vu, multifonctionnel mais aussi polyvalent en configuration (patins ou flotteurs). Son rotor principal est entièrement articulé. Chacune des trois pales comporte un indispensable amortisseur de traînée. Celui-ci nécessite, avec l’âge, une calibration ou carrément un remplacement intégral du jeu.

Le rotor anticouple bipale et son patin de sécurité.

Le rotor anticouple bipale tourne via un arbre connecté à la boîte de transmission principale ou BTP. Point de roulements intermédiaires ou encore de manchons, mais un amortisseur d’arbre – sorte d’anneau métallique – situé au milieu de la poutre, pour prévenir toute oscillation lors de changements de régime ! La puissance du moteur est transmise à la BTP via huit courroies. Le mécanisme d’accouplement, comprenant huit poulies folles, est régi par un tenseur ou actuateur linéaire. Celui-ci est commandé électriquement par le pilote. Le groupe de poulies supérieures intègre une roue libre entraînant la BTP. Ce système permet au rotor principal de fonctionner librement lors d’une autorotation. Les commandes de pas cyclique et collectif sont mécaniques. Toutefois, un compensateur électrique permet de stabiliser le tangage. Un ensemble de tringles et de biellettes assurent les transmissions : un système simple requérant une maintenance limitée (graissage, tolérance des jeux et tension). Les pales du rotor arrière sont connectées à des biellettes à double effet, elles-mêmes reliées aux palonniers via des câbles et des poulies. Là encore, l’entretien ne cause pas de maux de tête aux techniciens. Pas plus d’ailleurs que le reste de la mécanique ! En effet, cet hélicoptère n’étant quasiment pas caréné, hormis au niveau de la cabine, l’accès général demeure aisé.

Bien perché sur ses patins munis d’amortisseurs intégrés.

Les patins tubulaires sont munis de petits amortisseurs oléopneumatiques pour contrer la résonance au sol, propre aux hélicos à rotor articulé. Leur contrôle visuel périodique ainsi qu’un test font partie intégrante de la check-list.

Le quatre-cylindres Textron-Lycoming HIO-360-D1A, bien imbriqué sous la carlingue, garantit un bas centre de gravité.

En cas de défectuosité, ils doivent être rééquilibrés ou remplacés. Le quatre-cylindres Textron-Lycoming HIO-360-D1A, normalement aspiré, disposé à plat, développe 190 ch à 3200 tr/min. La plage d’opération du rotor principal est comprise entre 442 et 471 tr/min, moteur en route, tandis que le rotor de queue vire entre 2901 et 3094 tr/min. Le contrôle des niveaux d’huile respectifs est facile à effectuer. Un détecteur de métal de transmission est relié à un voyant situé sur la console de bord. Le Hughes/Schweizer 269/300 n’a pas d’assistance hydraulique ni de régulateur de puissance. Par conséquent : minimisation de la maintenance et augmentation de la charge de travail du pilote !

Valeur actuelle, révisions et coût des pièces

Approuvé par la FAA en mai 1970, le Hugues 269C a encore la cote. Un modèle récent, en bon état et avec un potentiel moteur correct, se détaille environ 150 000 $ US sur le marché nord-américain. En compulsant les annonces de Controller.com ou Trade-a-Plane.com, on peut aussi trouver des machines autour de 80 000 $ US. Naturellement, l’état et l’équipement varieront d’une offre à une autre. Le moins cher du marché ? Un 269B de 1964, avec 3069 heures TTSN, à réparer, annoncé à 35 000 $ US ! Par cher, certes, mais avec une restauration nécessitant nombre de composants à acheter… pas forcément faciles à dénicher ! L’appareil n’étant plus vraiment en production, les stocks du neuf et de l’occasion s’épuisent. Au Canada, Aero Recip (Winnipeg) dispose néanmoins d’un bon inventaire d’accessoires moteur. Aux USA, on relèvera quelques compagnies distributrices de pièces originales, telles que Heli-Mart, Kinzie Industries, Air Flite, etc. Autres ressources : les clubs, associations, récupérateurs et particuliers proposant, sur Internet, un échantillonnage hétéroclite pas toujours en état de navigabilité ! Au Québec, on notera la présence d’HélicoSB3 à l’aéroport de Saint-Mathieu-de-Belœil. Cet organisme de maintenance agréé assure la révision et le service de plusieurs marques d’hélicoptères, dont Hughes/Schweizer.

Simon, 18 ans, fils de Pierre Lamontagne, élève-pilote formé par Stéphane Bard.

Selon Pierre Lamontagne, président de l’entreprise, une vingtaine de 269A, B, C/300C sont entretenus in situ. La plupart de ces machines appartiennent à des privés. Quelques-unes sont utilisées pour de l’épandage agricole et bien moins encore en instruction. Exception faite de l’école de pilotage Hélico Pro/Foxair, basée sur place, qui emploie un 269 C (C-GCVL). Un choix avisé puisque ce modèle revient à peine plus cher qu’un R22 et peut accueillir une personne de 6 pi 4 (1,93 m) et 250 lb (113 kg) par siège. Le Hughes/Schweizer n’a pas de butée calendaire générale – contrairement au Robinson (12 ans). Par contre, les pales doivent être remplacées toutes les 5500 heures (coût approximatif : 30 000 $ CA l’unité) et la poutre de queue au bout de 4200 heures (± 25 000 $ CA). Au chapitre de l’entretien périodique, un graissage général est requis tous les 24 mois. Une lubrification d’appoint des six roulements de la tête de rotor principal doit avoir lieu après tout vol sous la pluie (±15 min de travail). Pour info, il y a plus de points de graissage sur un 269/300 que sur un R22. En entrevue, P. Lamontagne me précise qu’une révision annuelle ou toutes les 100 heures nécessite 16 heures d’ouvrage sur un Hughes/Schweizer versus de 12 à 14 heures sur un R22 (16 heures sur un R44). La détection de la corrosion sur la mécanique apparaît comme une question importante. Il faudra notamment surveiller l’état intérieur du mât du rotor principal et l’ensemble des roulements. La vérification de l’équilibrage constitue un point capital sur un rotor tripale. Plusieurs méthodes existent pour procéder aux tests. Chez Hélico SB3, les techniciens se servent d’un analyseur Vibrex 2000. Au niveau des consignes de navigabilité ou AD’s, la dernière date de novembre 2015 (www.caa.govt.nz/Airworthiness_Directives/HU269.pdf). On y trouve mandatée, entre autres, une inspection de l’arbre d’entraînement du rotor de queue (2 heures d’ouvrage chaque année ou toutes les 100 heures). D’autre part, le TBO du Lycoming HIO-360-D1A est de 1500 heures. Il faut compter 40 000 $ CA pour son overhaul. En terminant, il semblerait que le Hugues/Schweizer 269/300C ait encore de beaux jours devant lui. Loin d’être démodé, ce sympathique hélico semble plutôt indémodable.

 

 

 

Devinettes sur le Hughes 269 et évolutions

a)      Hughes Aircraft Company était une division de quelle compagnie ?

b)      En quelle année eut lieu le vol inaugural du Hughes 269 ?

c)      Quelle récompense reçut Hughes Helicopters de la National Aeronautic Association?

 

 

Réponses : a) Hughes Tool Company, spécialisée dans les têtes de forage pétrolier b) 1956 c) le Collier Trophy (1983)

 

Hughes 269C… en quelques chiffres

 

Diamètre du rotor principal : 26 pi 10 po (8,18 m)

Nombre de pales : 3

Diamètre du rotor de queue : 4 pi 3 po (1,3 m)

Nombre de pales : 2

Longueur (débattement des rotors inclus) : 30 pi 10 po (9,4 m)

Masse à vide : 1100 lb (499 kg)

Masse maximale (séries postérieures à numéro 209) : 2050 lb (929 kg)

Moteur : Textron-Lycoming HIO-360-D1A

Puissance : 190 ch @ 3200 tr/min

Réservoir standard : 29,8 gal (113 l)

Réservoir optionnel : 18,8 gal (71 l)

Vitesse maximale (Vne) : 95 kias (176 km/h) – Portes déposées : 89 kias (165 km/h)

Vitesse de croisière maximale, niveau mer @ 2 050 lb : 79 kts (146 km/h)

Vitesse en autorotation, au-dessus de 450 pi (137 m) : 52 kias (96 km/h)

Plafond théorique @ 2050 lb: 10 200 pi (3109 m)